Impacts psychosociaux de la COVID longue

Les personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es nous ont parlé de l’impact profond que la COVID longue avait sur leur vie. Nombre d’entre elles souffraient de solitude et d’isolement, car elles ne pouvaient quitter leur domicile que pour de courtes périodes et avaient souvent l’impression que les autres ne pouvaient pas comprendre ce qu’elles vivaient. Elles évitaient également tout contact social de peur de contracter à nouveau la COVID. Certain·es de nos participant·es souffraient d’anxiété et de dépression alors qu’iels faisaient face à cette maladie chronique difficile. Beaucoup ont exprimé le sentiment d’avoir changé et de ne plus être la même personne qu’avant la COVID longue.

 

Solitude et isolement

Nombre de nos participant·es, même celleux qui disposent d’un bon réseau de soutien, se sont senti·es seul·es et isolé·es comme jamais auparavant. Comme l’a exprimé Tanya : « Je ne me suis jamais sentie aussi isolée de toute ma vie… même si ma famille me soutient beaucoup. Ce sentiment d’isolement est très fort ». Ou comme l’explique Jean, « lorsque vous êtes à la maison, vous manquez évidemment un aspect de la socialisation… qui affecte le cerveau. Ça peut sembler formidable de pouvoir s’asseoir au lit et regarder Netflix toute la journée, mais on se lasse très vite. »

Pour Nicole, l’isolement est aggravé par le fait que d’autres personnes doutent de la réalité de la COVID longue.

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It’s been really isolating. I mean we were all – the whole world was in isolation and everyone knows how difficult that was. But to have this on top of that was really difficult, to be invalidated and people not even believing that you’re sick is really something difficult to […]

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Crainte de la réinfection

De nombreuses personnes avec qui nous avons discuté s’inquiétaient de fréquenter d’autres personnes parce qu’elles craignaient de contracter à nouveau la COVID, étant donné qu’une réinfection peut aggraver les symptômes. Comme nous l’a dit Melissa, « je ne veux pas sortir… Je ne veux pas avoir de relations sociales… Il y a toujours cette peur… peur des autres ». Ou comme l’a exprimé Anna : « Je dois être honnête et dire que je préfère rester à la maison plutôt que d’aller… là où un grand nombre de personnes se rassemblent. Je crains de contracter à nouveau la maladie… J’ai tout simplement peur d’une nouvelle aggravation des symptômes. Et je pense que la plupart des personnes atteintes de COVID longue ont la même crainte. »

Katherine craint de retourner au bureau.

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I think my anxiety level is higher in that I am scared to return to the workplace. I am scared to be exposed again to COVID because of what happened to me this time. I really want to avoid it at all costs. I thought I was avoiding it at […]

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Carrie1 réfléchit à l’impact de la crainte d’une réinfection sur les amitiés.

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I think long COVID as well has had a lot of impact, I think on my friendships. I used to be a very social person. I was always on the social committee at work and always loved spending time with my colleagues and it’s been really hard I think on […]

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Cathy dit être devenue ermite.

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There’s also the psychological effects of the fear of getting it again. Because some people get it two and three times and then they get very sick and they get sicker. And there’s no way to tell. So then once again I have to be very careful to protect myself. […]

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Vivre avec la COVID longue a un impact sur la santé mentale.

Les personnes avec lesquelles nous avons discuté ont décrit une grande variété de façons dont la vie avec la COVID longue a eu un impact sur leur santé mentale. Certaines d’entre elles souffraient d’anxiété, de dépression ou d’autres problèmes de santé mentale avant la COVID. Plusieurs d’entre elles, mais pas toutes, ont déclaré que leur expérience avec la COVID longue avait aggravé ces problèmes. Un certain nombre de participant·es ont fait appel à des professionnel·les de la santé mentale pour les aider à faire face à des symptômes spécifiques ou, plus généralement, à une maladie chronique. Certain·es s’étaient également vu prescrire des médicaments contre la dépression et l’anxiété.

Kristen a commencé à travailler avec un·e thérapeute qui, dit-elle, « a changé ma vie de façon spectaculaire. J’aime mon/ma thérapeute et nous avons déployé beaucoup d’efforts afin de traverser une année si difficile ». William a adopté une approche similaire. Il explique : « Je suis en ce moment avec un·e thérapeute. J’ai vu un·e psychologue et un·e psychiatre… et je pense que c’est très utile pour moi, en particulier parce que j’étais tellement indépendant que je n’avais pas vraiment un vaste réseau de personnes à qui je pouvais m’adresser. » Paulina s’est décrite comme souffrant d’anxiété et de dépression parce que sa vie « a été bouleversée. Je ne peux pas faire les petites choses qui nous apportent de la joie tout au long de la journée. Je commençais donc à être très, très déprimée et anxieuse, et le Lexapro m’a aidée à y remédier ». Victor a constaté que son anxiété augmentait considérablement en vivant avec la COVID longue. Cependant, le fait d’emménager avec des ami·es et de prendre des médicaments l’a beaucoup aidé. Il nous a dit : « Quand j’étais seul dans mon appartement et que je ne prenais pas de médicament contre l’anxiété… j’étais une véritable épave… C’était un sentiment de désespoir que je n’avais jamais connu auparavant… Depuis mon arrivée ici, j’ai commencé à prendre des médicaments… c’est comme le jour et la nuit. »

Malheureusement, même avec un soutien professionnel ou des médicaments, certaines des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es souffraient de graves problèmes de santé mentale dus à la tension engendrée par le fait de vivre avec la COVID longue. Jennifer 1 nous a dit : « Lorsque j’ai commencé mon parcours avec mon/ma psychologue, tout allait bien. Un an plus tard, je souffre d’anxiété et de dépression sévères, et je suis sous antidépresseurs. Je n’ai pas honte de prendre un antidépresseur, mais je n’ai jamais pensé que j’arriverais à un point où j’en aurais besoin. » Cher a connu une aggravation sévère d’une dépression existante. Elle explique : « J’avais déjà lutté contre la dépression dans ma vie, mais j’avais toujours réussi à la dissimuler. Je n’arrivais plus à le cacher… Mon médecin traitant s’inquiétait aussi pour moi, alors nous avons fini par consulter un·e psychiatre et par changer une grande partie de mes médicaments… J’étais plutôt suicidaire chaque jour, simplement parce que je me demandais “qu’est-ce que je suis censée faire avec cette douleur? Comment est-ce que je suis censée vivre?” »

Chris a l’impression de se retrouver sur des montagnes russes de symptômes physiques et d’anxiété.

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There’s no question that I have had a definite triggering of anxiety. That, you know, I didn’t have or wasn’t aware of issues with anxiety before I started feeling these symptoms. But certainly initially when I just had a range of unknown symptoms that I didn’t have any way to […]

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Lyse se retrouve à pleurer sans autre raison que la fatigue.

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Il y a des journées aussi que quand je suis trop fatiguée, je le sens, parce que je me mets à pleurer pour rien. C’est ça, je vais penser à quelque chose puis là je me mets à pleurer ou je vais parler avec mon conjoint, puis à un moment […]

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Perte d’activité physique

Pour de nombreuses personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es, l’activité physique était un moyen sain de gérer le stress dans leur vie avant la COVID. La perte de leur capacité à faire de l’exercice est l’une des raisons les plus souvent invoquées par les participant·es pour expliquer leur dépression. Hollie l’a expliqué simplement : « J’avais l’habitude d’aller régulièrement à la salle de sport… J’étais en bonne forme. Cela a été difficile pour moi parce que si vous avez un certain style de vie et que vous devez soudainement changer, cela vous affecte beaucoup. » Ou, comme le dit Nicole, « dans le passé, mon mécanisme d’adaptation à l’anxiété a toujours été l’exercice. Et comme je n’ai pas d’exutoire, j’ai l’impression que cela ne fait qu’empirer les choses ».

 

Imprévisibilité de la COVID longue

Une autre raison fréquemment invoquée par les participants pour expliquer leur détresse mentale était l’imprévisibilité de la COVID longue. Il s’agissait à la fois de l’amélioration ou de l’aggravation des symptômes sans raison évidente et de l’incertitude quant à ce qui leur arriverait à long terme.

La réapparition des symptômes après une période d’amélioration relative peut être très démoralisante pour de nombreuses personnes avec lesquelles nous avons discuté. Lori a parlé de la façon dont « cela vous affecte parce que chaque fois que vous tombez malade, cela vous décourage, vous avez l’impression que “vous vous moquez de moi, encore une fois”. Et donc, de façon répétitive, cela vous affecte… Les sentiments négatifs qui en découlent reviennent toujours ».

Ruth ne fait plus confiance à son corps.

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So yes, this has affected me psychologically, for sure. And emotionally, just not knowing how you’re going to be in a few hours, or the next day, makes you not trust your body. I knew my body very well. You know, symptoms, like signs. I just knew it so well. […]

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Lesley trouve angoissante l’incertitude quant aux effets possibles à long terme de la COVID longue.

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I think one of the scariest things, psychologically, is not knowing what’s going to happen and then seeing like – you know for the most part if you get a diagnosis of let’s say diabetes, you have a relative trajectory of what can happen, of course it can go extreme. […]

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Valérie frappe un mur émotionnellement à chaque fois que ses symptômes d’aggravent.

Témoignage écrit

Les rechutes, c’est ce qui est vraiment le plus difficile avec la COVID longue … parce qu’on ne sait jamais si on va vraiment revenir comme on était avant la rechute. Puis on ne sait jamais dans combien de temps non plus … Mais comme je dis, quand j’arrive dans une rechute, que là je frappe un mur et que je régresse énormément puis t’sais c’est sûr que quand qu’on vit des rechutes, bien en tout cas, pour ma part, les symptômes reviennent tellement en force, que non seulement je ne suis plus capable de faire qu’est-ce que j’étais capable de faire avant la rechute, mais en plus de ça, je dois composer avec des symptômes qui rendent ma vie très désagréable comme des sensations de brûlure, comme si j’avais un coup de soleil sur tout le corps. Des douleurs musculaires, articulaires, des maux de tête, tellement intense, que juste la lumière le soir, c’est l’enfer! L’hyper sensibilité sensorielle devient juste complètement hors contrôle, au point où je dois passer une grosse partie de ma soirée dans ma chambre, dans le noir, avec pas de bruit, rien. Ça, c’est les moments que je trouve le plus difficiles parce que je me retrouve encore dans une espèce de bulle de solitude, qui m’amène à … qui génère énormément d’anxiété aussi à ces moments-là, parce que justement t’sais on… Je ne peux comme rien faire, parce que là, je suis comme en surcharge. Puis à ce moment-là, c’est très facile pour le cerveau commencer à spinner comme on dit. À réfléchir à toutes sortes d’affaires puis se faire toutes sortes de scénarios.

 

Perdre la personne qu’on était

Si la plupart des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es s’adaptaient à la vie avec la COVID longue, beaucoup se rappelaient des moments sombres où elles éprouvaient un sentiment de désespoir et pleuraient la perte de leur ancien moi. Aislene a ressenti « une grande dépression et de la culpabilité » parce qu’elle ne pouvait plus faire ce qu’elle faisait d’habitude et a trouvé « décourageant » de ne pas pouvoir faire les choses qu’elle aime. Paulina nous a dit qu’elle avait « perdu l’espoir » de se rétablir un jour. Elle a déclaré : « C’est un deuil, un deuil de votre mode de vie, de vos relations. J’ai perdu des ami·es, vous savez, qui ne croient pas à cette histoire de COVID, et c’est très difficile. Donc, je pense qu’il faut que j’accepte que ce soit ma vie maintenant et que je dois en profiter du mieux que je peux. » Jason s’est décrit comme « une enveloppe de mon ancien moi et pas capable de vivre les choses de manière aussi dynamique qu’avant ».

Kari comprend pourquoi certaines personnes atteintes de COVID longue éprouvent du désespoir.

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I have said to my psychologist, I understand, not that I want to, but I understand why people take their life, because they truly feel like there’s no point and they’re at the end of their rope, because you know, you literally are grieving your previous life. We, I can’t […]

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Tanya regrette la personne saine et active qu’elle était auparavant.

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I feel like I have and continue to grieve the healthy, mobile person that I used to be. And, you know, the unknown of whether this is the way I’m going to be from now on. I mean, there’s certainly no news out there about there being a cure for […]

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Selon Anna, les gens ne se rendent pas compte de ce que cela signifie de passer d’une bonne santé à une maladie chronique du jour au lendemain.

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Nobody really thinks about how mentally that impacts a person who was like just, you know, just a perfectly healthy person like few days ago, and then ends up in an emergency three times in a row within five days, or suddenly cannot eat anything, anything at all. And not […]

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Dernière mise à jour2024-03