Conseils aux décideurs politiques

De nombreuses personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es ont prodigué des conseils aux décideurs politiques sur la base de leur expérience de la vie avec la COVID longue. La reconnaissance de la maladie, de la sensibilisation du public et de la résolution des problèmes liés à l’emploi, à l’assurance et aux besoins d’assistance quotidienne des personnes vivant avec la COVID longue ont été des préoccupations majeures.

 

Absence de reconnaissance de la COVID longue

Les participant·es ont exprimé leur frustration quant au fait que les décideurs politiques n’ont pas accordé à la COVID longue la même attention qu’à la forme aiguë de la COVID tout au long de la pandémie. Comme l’a dit Nick, “There has to be more communication of long COVID by the policymakers, so that patients … are aware that there might be a chance that these symptoms linger on.” [« les décideurs doivent communiquer davantage sur la COVID longue, afin que les patient·es sachent qu’il y a un risque que ces symptômes perdurent. »] Traduction de l’original anglais. Tanya est du même avis, “Canada has barely even gotten to the point where they’re acknowledging that it’s a thing, and that, potentially, there’s tens of thousands of people affected by this.” [« le Canada en est à peine au stade de la reconnaissance de l’existence de la maladie et que potentiellement, des dizaines de milliers de personnes sont concernées par ce problème. »] Traduction de l’original anglais. Cathy se souvient que “Every single day, every province, with their medical directors of health, would say how many people had COVID, how many people died … Never, ever has it been listed how many people have got long COVID.” [« chaque jour, chaque province, avec leurs directeurs médicaux de la santé, disait combien de personnes avaient contracté la COVID, combien en étaient décédées. Jamais, au grand jamais, on n’a indiqué combien de personnes avaient contracté la COVID longue. »] Traduction de l’original anglais. Louise a fait une observation similaire : “Two percent die and you make a whole big hoo-ha about that. But the 10 to 15% of people who are still sick nine months later get zero acknowledgement.” [« Deux pour cent des patients meurent et on en fait tout un plat. Mais les 10 à 15 % de personnes qui sont toujours malades neuf mois plus tard ne sont pas du tout reconnues. »] Traduction de l’original anglais. Carrie1 est « très déçue par le gouvernement et les décideurs politiques en général ». Elle estime que l’accent mis sur le retour à la normale de l’économie et de la société signifiait qu’ils avaient fait « le choix délibéré de ne pas parler de la COVID longue ».

Les participant·es craignent également que la COVID longue ne devienne une question politique. Cathy a fait remarquer qu’il y avait encore « beaucoup de négationnistes, certains partis politiques ont décidé que ce n’était pas réel. Je pense qu’ils ont besoin d’entendre les gens qui en souffrent, de savoir comment cela a changé leur vie ».

Tanya met en contraste l’intense communication publique autour de la forme aiguë de la COVID et le silence relatif autour de la COVID longue.

Transcription

All of these news briefs that they have given throughout the course of the pandemic, it was not acknowledged that even a mild COVID infection, or, in some cases, even asymptomatic COVID infection, could result in long-term, very debilitating, and very serious illness for many, many people. We repeatedly heard […]

Lire la suite

Violaine estime que la santé publique a fait l’autruche et que le manque de femmes décideurs en est en partie la cause.

Transcription

Bien jusqu’à présent c’est vraiment un scandale de santé publique, la façon dont le gouvernement ne s’occupe pas de nous, ne nous soigne pas, fait l’autruche. Je ne sais pas ce qu’ils ont pensé? Ils ont pensé quoi? Qu’on guérirait par nous-mêmes? Qu’ils auraient juste à ne pas trop s’occuper […]

Lire la suite

 

Absence d’estimation du nombre de personnes touchées

Plusieurs participant·es ont suggéré que la COVID longue était ignorée parce que nous ne savons pas encore combien de personnes sont touchées. Selon Jason, cela s’explique en partie par le fait que “Governments focus on what can be measured and … there is now a grey area between having a condition that is very acute and having a chronic condition that … may or may not be officially diagnosed.” [« les gouvernements se concentrent sur ce qui peut être mesuré. Il y a maintenant une zone grise entre le fait d’avoir une maladie très aiguë et le fait d’avoir une maladie chronique qui peut ou non être officiellement diagnostiquée. »] Traduction de l’original anglais. En outre, comme le rappelle Nicole, « nous avons toute une nouvelle population de patient·es qui n’ont [même] pas la preuve qu’iels ont contracté la COVID » parce que le gouvernement a mis fin aux programmes de dépistage lorsque le nombre de personnes infectées est devenu trop élevé. Tous deux ont souligné les implications financières de la reconnaissance d’une nouvelle population de malades chroniques. Jason a souligné que « ces maladies chroniques difficiles à mesurer sont extrêmement coûteuses pour le pays à bien des égards », tandis que Nicole estime que « le gouvernement ne veut pas nous compter parce qu’il devrait nous accorder des prestations d’invalidité ».

 

Déception face à l’assouplissement des mesures sanitaires

Un certain nombre de nos interlocuteur·rices se sont dit·es blessé·es et déçu·es face à l’assouplissement des mesures sanitaires, notamment l’obligation de porter un masque dans les lieux publics. Iels ont eu le sentiment d’être abandonné·es et se sont dit·es extrêmement vulnérables à une nouvelle infection. Carrie1 avait le sentiment que les décideurs politiques « ne se préoccupent que de l’économie » et étaient prêts à laisser les personnes atteintes de COVID longue être les « dommages collatéraux acceptables ». Katherine est inquiète de ce qui lui arriverait si elle contractait à nouveau la COVID. Elle pense que « l’abandon de l’obligation de porter un masque était la chose la plus stupide qu’ils pouvaient faire ».

Carrie2 ne comprend pas pourquoi les autres sont si opposé·es au port du masque dans les lieux publics.

Transcription

I think the way it’s been affecting my mental health the most, is really disappointment in public health and feeling excluded from spaces because I’m so petrified of getting sick again. I am so scared. And when the masks came off, I feel more frightened in indoor settings. I wear […]

Lire la suite

 

Besoin d’aménagements sur le lieu de travail

Bon nombre des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es n’ont pas pu reprendre le travail en raison de leurs symptômes de COVID longue. Beaucoup ont également exprimé leur inquiétude quant au risque d’être infectées de nouveau après leur retour sur le lieu de travail. D’autres ont dû réduire leurs heures de travail ou modifier leurs tâches pour pouvoir continuer à travailler. Coucoute, par exemple, est aide-soignante. Elle explique, « Ma job que j’ai faite, c’est une job physique OK, je travaille dix jours. Je ne me sens pas prête de reprendre le travail tout de suite pour faire dix jours. »

Malgré ces difficultés, comme nous l’a rappelé Ruth, les personnes atteintes de COVID longue « veulent travailler, se sentir utiles et faire partie de la société ». C’est pourquoi les participant·es ont souligné la nécessité d’aménagements sur le lieu de travail. Comme le dit Luna, “Everybody who got long-COVID wants to be back to their useful selves. They want to feel like a part of society in a way that they used to be … You don’t have to be 100% disabled to not be able to work a full day … [we need] some kind of partial disability or changing the way work hours are considered.” [« tous ceux et celles qui ont contracté la COVID longue désirent redevenir utiles. Iels veulent avoir l’impression de faire partie de la société comme iels en avaient l’habitude. Il n’est pas nécessaire d’être handicapé·e à 100 % pour ne pas pouvoir travailler une journée entière. [Il faut] une sorte d’invalidité partielle ou une modification de la façon dont les heures de travail sont prises en compte. »] Traduction de l’original anglais. Jason est du même avis. Il nous a confié : “I don’t want to be on disability. I really like working … the [government] should make it easier for … people like me that really want to work … some sort of accommodated assistance.” [« Je ne souhaite pas être en invalidité. J’aime vraiment travailler. Le [gouvernement] devrait faciliter les choses pour les gens comme moi qui veulent vraiment travailler, une sorte d’assistance adaptée. »] Traduction de l’original anglais.

Carrie 2 est médecin de famille. Elle explique les raisons pour lesquelles les accommodements pour les maladies chroniques sont si importants.

Transcription

Our society isn’t very good at helping people with chronic illness. It’s just – we don’t – we say we make adjustments but we really don’t. So what if I can’t go back to being on call? I may have to quit my office because everybody has to be on […]

Lire la suite

L’employeur de Katherine insiste pour qu’elle retourne au bureau malgré les risques pour sa santé.

Transcription

Our agency, everyone is forced back into the workplace, even my particular office is even going against the federal recommendation of two days a week in the office, and demanding the entire building come in on one – or sorry, my entire unit come in one day a week. So, […]

Lire la suite

 

Couverture d’assurance inadéquate

Les personnes interrogées nous ont fait part de leurs préoccupations concernant la couverture d’assurance limitée dont bénéficient de nombreuses personnes atteintes de COVID longue. Elles ont également évoqué le problème des assureurs qui refusent les demandes d’invalidité des personnes touchées par cette maladie.

Katherine a bénéficié du soutien de l’assurance accidents du travail, car elle a été infectée par la COVID sur son lieu de travail. Toutefois, elle souligne que si elle n’était pas tombée malade au travail, “there would have been a 14-week gap in income until long-term disability kicks in … Employment insurance sick benefits … were 14 weeks. But you get paid something like 65 percent of your income. I don’t think I would have survived. I might have lost my home had that happened to me.” [« il y aurait eu un écart de revenu de 14 semaines jusqu’à ce que l’invalidité de longue durée entre en jeu. Les prestations de maladie de l’assurance-emploi s’élèvent à 14 semaines. Mais la rémunération représente 65 % de vos revenus. Je ne pense pas que j’aurais survécu. J’aurais peut-être perdu ma maison si cela m’était arrivé. »] Traduction de l’original anglais. Angela s’est montrée encore plus inquiète pour les travailleur·ses autonomes : “There’s a lot of people who work for themselves that are dealing with this. And there’s nothing. The long COVID sick benefit was six weeks.” [« Beaucoup de gens qui travaillent à leur compte sont confronté·es à cette situation. Et il n’y a rien. L’indemnité de maladie pour la COVID longue était de six semaines. »] Traduction de l’original anglais.

Lyse ne sait pas ce qui se passera lorsque son assurance emploi sera épuisée.

Transcription

C’est quoi notre avenir? Il ne faut pas regarder trop loin là parce qu’on ne sait pas. Moi, si mes assurances demain matin, elles décident de… Là je suis sur mes assurances emploi, mais ce n’est pas long l’assurance emploi, c’est 16 semaines. Si eux décident après 16 semaines qu’ils […]

Lire la suite

Aislene soutient que les personnes en situation d’invalidité de longue durée ne devraient pas être condamnées à la précarité.

Transcription

We need more safety nets for people that are disabled so that they’re not living in poverty. The disabled community are given less than $1,000 a month and they are supposed to eat, live in an apartment, and survive and that is just impossible especially with the rising cost of […]

Lire la suite

 

Reconnaître la COVID longue comme une condition invalidante

Un autre sujet de préoccupation pour les personnes que nous avons interrogées est le fait que les assureurs ne reconnaissent pas la COVID longue comme une invalidité de longue durée. Ruth se souvient qu’au début sa COVID longue « n’était pas codée comme quoi que ce soit », si ce n’est que « Ruth a un tas de symptômes ». Elle estime que “the policymakers of the government … need to really hurry up and make this a known condition so the insurance companies would have it down.” [« les décideurs politiques du gouvernement doivent vraiment se dépêcher de faire reconnaître cette maladie, afin que les compagnies d’assurance la prennent en compte. »] Traduction de l’original anglais. Kari connaît “many people … that … are losing their houses … everything that they’ve worked for because their … [insurers] will not accept long COVID as a disability …  It has to be documented and accepted as an actual illness so that there can be some kind of protection for people financially.” [« de nombreuses personnes qui perdent leur maison, tout ce pour quoi elles ont travaillé parce que leurs [assureurs] n’acceptent pas la COVID longue comme une invalidité. Elle doit être documentée et acceptée comme une maladie réelle afin qu’il puisse y avoir une certaine forme de protection financière pour les gens. »] Traduction de l’original anglais.

Jennifer2 estime que les compagnies d’assurance devraient être tenues d’accepter la COVID longue comme diagnostic.

Transcription

If we have accepted that it is a thing, you know, that it does exist, then make insurance companies, force them if you have to, to accept that long COVID is the diagnosis … People are afraid to apply if they don’t know. Even I was afraid to apply, I […]

Lire la suite

Valérie décrit son combat pour faire reconnaître sa maladie.

Témoignage écrit

C’est sûr que moi dans mon cas, j’ai un diagnostic d’encéphalomyélite-myalgique qui n’est pas nouveau. Même si c’est ce diagnostic-là, n’empêche qu’il n’est pas reconnu, même si ça fait des dizaines d’années que ça existe cette maladie-là puisqu’ils connaissent quand même ça, ils ont tendance à rejeter très, très facilement les demandes pour des gens qui ont le EMM. Donc la COVID longue rentre un peu dans le même forfait avec ces maladies post-infectieuses comme on sait, fait que c’est sûr que, de devoir démontrer que ça va être permanent, c’est difficile ! Puis là je suis rendue dans le fond à… J’ai fait une demande de révision, parce que ma première demande a été refusée. Et ils m’ont envoyée en expertise voir un de leurs médecins, évidemment. Donc c’est vraiment des combats, des batailles que je dois mener puis que plein d’autres personnes doivent mener comme moi, pour faire reconnaître la gravité de leurs symptômes puis l’invalidité qui vient avec. La notion de permanence c’est très difficile et ça rajoute encore une fois un stress supplémentaire, stress financier, puis un stress de devoir aussi se battre pour faire reconnaître qu’est-ce qu’on vit au quotidien, puis à quel point la maladie a pu chambouler ma vie, dans le fond, celle de ma famille puis ce qui est vraiment dommage, c’est que c’est vraiment ma seule option sincèrement.

 

Prise en charge des frais médicaux remboursables et de la réadaptation par un·e spécialiste

Les personnes vivant avec la COVID longue ont parfois été orientées vers des prestataires de soins spécialisés non couverts par l’assurance maladie. Cela peut entraîner des frais très importants qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Lesley explique que “You often get referred to physiotherapists for pain management or chiropractors for pain management – again not covered by OHIP – super-expensive. All the dental stuff was tens of thousands of dollars for me – not covered by OHIP. So I wish that there could be a bigger conversation between government funding and healthcare.” [« on vous oriente souvent vers des physiothérapeutes ou des chiropraticien·es pour le traitement de la douleur. Encore une fois, l’OHIP ne les couvre pas (Régime d’assurance maladie de l’Ontario), ce qui est très onéreux. Tous les soins dentaires m’ont coûté des dizaines de milliers de dollars et n’étaient pas couverts par OHIP. J’aimerais donc que le dialogue entre le financement public et les soins de santé soit plus approfondi. »] Traduction de l’original anglais.

Kristen estime être chanceuse, car elle bénéficie de « bons avantages » de la part de son employeur. Elle a toutefois souligné que « d’autres personnes ne bénéficiaient peut-être pas de la même chance ». Elle pense qu’il faudrait « davantage de ressources payées et disponibles pour les gens ».

Chris pense que tout le monde devrait avoir accès à une réadaptation multidisciplinaire.

Transcription

I think certainly clinics like this – one of the advantages of this one, is it brings in components that might not necessarily be covered by the public healthcare system. The physiotherapy, the psychotherapy, I think have been essential already and will continue to be essential for the rehabilitation, for […]

Lire la suite

 

Soutien pour les besoins quotidiens

Les personnes atteintes de COVID longue ont souvent du mal à assumer les tâches et responsabilités quotidiennes telles que les courses, la cuisine, le ménage, la lessive et la garde des enfants. Plusieurs de nos interlocuteur·rices ont estimé que les décideurs politiques devraient envisager des subventions ou des allocations permettant aux personnes atteintes de COVID longue d’obtenir une aide supplémentaire pour faire face à ces besoins quotidiens.

Jenifer1 explique pourquoi de nombreuses personnes atteintes de COVID longue ont besoin d’un soutien quotidien.

Transcription

People with long COVID need support on just the daily things. Your cleaning, your food … Being supplemented or at least given a cheaper option for like if you need to use a taxi, or Uber, or what have you to get to an appointment. Because that day you can’t […]

Lire la suite

Paulina aimerait pouvoir bénéficier d’une aide à domicile.

Transcription

You know, people with young kids. Like, I don’t – I don’t know if it would be even possible to get, like, a – like someone assigned to you that can come once a week to help you whatever – like if it’s putting the dishes away or watching the […]

Lire la suite

 

La COVID longue a besoin d’une meilleure définition du handicap

Plusieurs des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es ont souligné le fait que la COVID longue est une maladie complexe qui ne correspond pas facilement à la définition conventionnelle du handicap. Les symptômes peuvent être épisodiques, c’est-à-dire qu’ils vont et viennent et s’aggravent à certains moments plus qu’à d’autres. Plus de 100 symptômes possibles ont été signalés. La COVID longue affecte également les personnes de différentes manières et à des degrés divers. Notre compréhension de la maladie est encore assez limitée, même si elle progresse rapidement au fur et à mesure que nous en apprenons davantage sur elle. Comme l’explique Christine, “Long COVID is an evolving thing and that usually doesn’t pair very well with policy … When you write policy … it has to be worded in a way that is living … COVID might not look like this in a year and it might not look like this in two weeks – so whatever policy you’re making has to address the fact that this is an organic thing that is going to change.” [« la COVID longue est une maladie évolutive et cela ne va généralement pas très bien avec la politique. Lorsque vous élaborez une politique, elle doit être formulée de manière vivante. La COVID pourrait ne pas ressembler à cela dans un an et ne pas ressembler à cela dans deux semaines. Par conséquent, quelle que soit la politique que vous mettez en place, elle doit tenir compte du fait qu’il s’agit d’une chose organique qui va changer ».] Traduction de l’original anglais.

aerik pense que les systèmes d’aide aux personnes handicapées ne reflètent pas la réalité de la vie avec une maladie chronique.

Transcription

Disability systems are really built around a very static definition of disability … but really fail for people with chronic illnesses. When the whole system is premised on being able to prove that you can’t do x, y, and z ever, that’s not how most of us experience chronic illness […]

Lire la suite

Dernière mise à jour2024-03