Soutien des employeurs, des collègues et des commissions des accidents du travail
Selon nos participant·es, l’un des impacts les plus importants de la COVID longue sur leur vie a été leur capacité à travailler. La faiblesse physique, l’épuisement après l’effort (connu sous le nom de malaise post-effort) et l’incapacité à se concentrer ou à regarder des écrans ont rendu leur travail difficile. Certaines personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es avaient des employeurs et des collègues qui comprenaient leur situation et leur offraient un soutien personnel et des modalités de travail flexibles pour répondre à leurs besoins. Ce qui a permis à certaines personnes de continuer à travailler. D’autres ont choisi de prendre leur retraite ou ont simplement réalisé ne plus pouvoir continuer à occuper un emploi même si elles le souhaitaient. Cependant, toutes les personnes avec lesquelles nous avons discuté n’ont pas été bien soutenues. Plusieurs de nos participant·es ont eu l’impression qu’on leur mettait la pression pour qu’iels acceptent un horaire de travail qu’iels ne pouvaient pas gérer. Quelques-unes des personnes avec lesquelles nous avons parlé ont pu bénéficier d’une indemnisation pour accident du travail parce qu’elles avaient été infectées par la COVID-19 dans le cadre de leur emploi.
Bon soutien de la part des employeurs et des collègues
Certain·es participant·es ont déclaré qu’iels se sentaient bien soutenu·es par leur employeur et leurs collègues. Ce soutien peut prendre de nombreuses formes, notamment des congés payés, des tâches modifiées, des horaires et des modalités de travail flexibles, un retour au travail progressif et la fourniture d’équipements adaptés. Par exemple, Christine a reçu un « très grand écran d’ordinateur » et un nouveau microphone pour réduire la fatigue de ses yeux et de sa voix. Cher a fini par renoncer à travailler, mais, avant qu’elle ne prenne cette décision, son employeur était disposé à discuter d’un poste de travail spécialement adapté pour qu’elle puisse travailler en position allongée. Les employeurs de Ruth “were holding my spot and my work, was super nice … But eventually we had to make that decision as I’m not coming back. There’s no way I can keep up with my workload at all.” [« m’ont gardé ma place et mon travail, c’était super sympa… Mais finalement, nous avons dû prendre cette décision, car je ne reviendrai pas. Il n’y a aucune chance que je puisse continuer à assumer ma charge de travail ».] Traduction de l’original anglais. Emily est l’un·e des participant·es qui disposaient de jours de maladie accumulables à son emploi. Elle a déclaré : “I’ve never been sick before, so I had lots of sick time in my bank and I’ve been able to make use of that.” [« Je n’avais jamais été malade auparavant, j’avais donc beaucoup de congés de maladie en banque et j’ai pu les utiliser. »] Traduction de l’original anglais.
Mais si ces formes de soutien sont importantes, le sentiment que les gens les croient lorsqu’iels disent qu’iels ne vont pas bien, même si leurs symptômes sont souvent étranges et imprévisibles, l’est encore plus. Emily a été infectée au début de la pandémie, lorsque la COVID longue n’était pas encore reconnue. Elle explique : “In the beginning I think they didn’t really understand … so I felt less supported … But they’ve been really great, as far as being supportive to me … they’ve just been fantastic about checking in with me regularly to make sure that I’m feeling better and that my schedule is working for me and giving me lots of flexibility.” [« Au début, je pense qu’iels ne comprenaient pas vraiment… et je me suis sentie moins soutenue. Mais iels ont été vraiment formidables, en ce qui concerne le soutien qu’iels m’ont apporté. Iels ont été fantastiques en prenant régulièrement de mes nouvelles pour s’assurer que je me sentais mieux et que mon emploi du temps me convenait et m’offrait beaucoup de flexibilité. »] Traduction de l’original anglais. La mémoire de Clémentine a été affectée par la COVID longue. Ses gestionnaires lui ont assuré qu’elle pouvait « poser les mêmes questions à de nombreuses reprises » et qu’« iels comprendraient, répéteraient ou reformuleraient ». Manali travaille dans la recherche médicale. Elle se sent « privilégiée de ne pas avoir à les convaincre, iels savent de quoi il s’agit ». Jennifer2 a travaillé comme avocate pour le gouvernement fédéral. Elle nous a dit : “We probably have one of the strongest protections in terms of employment. I ran out of sick leave obviously with all that COVID and everything, but they let me go on leave without pay immediately, no questions asked … and when I said I needed accommodation, they said, ‘Absolutely, no problem.’” [« Nous avons probablement l’une des protections les plus solides en matière d’emploi. J’ai épuisé mes congés de maladie en raison de la COVID et de tout le reste, mais iels m’ont immédiatement accordé un congé sans solde, sans poser de questions… et lorsque j’ai dit que j’avais besoin de mesures d’accommodation, iels m’ont répondu “Absolument, pas de problème.” »] Traduction de l’original anglais.
William occupe des tâches modifiées et augmente progressivement ses heures de travail.
Transcription
Work has been really good. I did get it at work so they kind of know that they have to help me out and they have been very helpful. I took off almost three months in recovering which was nice and I was being paid for that which is good. […]
Kristen a bénéficié d’un complément de salaire et d’un retour progressif au travail.
Transcription
So, one thing was a gradual return to work. So, they were really good at setting up a schedule for me and really giving me the time. Like, if I couldn’t come in that day, I would just take a sick day and it was totally fine with them. So […]
Carrie2 apprécie le fait que ses collègues lui aient offert des formes de soutien très concrètes.
Transcription
These are all highly accomplished busy people and they were the ones that, when I kept saying, “OK. Can someone cover this call for me?” They just gathered and said, “No. You’re off the call schedule.” And they have been remarkable at being specific. It’s something I really learned. A […]
Anna mentionne qu’elle est soutenue à tous les niveaux au travail.
Transcription
Luckily I do have understanding at my work, and that really means a lot to me. On all the levels, from my teammates, from my manager, and from my director … When I produced totally inaccurate analyses and stuff, yeah, they were still understanding, and nice to me, and comforting, […]
L’employeur et les collègues de Chris le soutiennent, mais il s’inquiète toujours de son avenir professionnel.
Transcription
So I’ve been, you know, gradually draining the sick leave bank but once that’s gone, I definitely face the prospect of, you know, not being able to do my job full-time still. So I don’t know what happens then because I’m in this gray area of, you know, not necessarily […]
Un manque d’accommodement
Plusieurs des personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es ont déclaré que leur employeur ne leur offrait pas le type de soutien et d’accommodement dont elles estimaient avoir besoin. Nicole, par exemple, est enseignante à l’école primaire. Elle explique : “They told me to take breaks. But, as a teacher, it’s kind of impossible in a class of 22 eight-year-olds to just take a break whenever you want. You can’t. So I make sure at recess that I lock the door, turn off the lights and try and have 15 minutes of quiet time … I felt pretty on my own … they weren’t very accommodating.” [« Iels m’ont dit de faire des pauses. Mais, en tant qu’enseignante, c’est impossible, dans une classe de 22 enfants de huit ans, de prendre une pause quand on le souhaite. C’est impossible. Je m’assure donc, pendant la récréation, de fermer la porte à clé, d’éteindre les lumières et d’essayer d’avoir 15 minutes de calme… Je me sentais assez livrée à moi-même… Iels n’ont pas été très conciliant·es. »] Traduction de l’original anglais. Katherine voulait continuer à travailler à temps partiel, mais elle fut contrainte de prendre un congé de maladie non rémunéré. Elle nous a dit : “It was my employer that decided that the reduced work hours were not working for them anymore … and they no longer wanted me to try to keep working … so they forced me onto sick leave without pay … If I hadn’t made that workers’ compensation claim when I did, I might be in serious financial trouble.” [« Mon employeur a décidé que la réduction du temps de travail ne lui convenait plus… et il ne voulait plus que j’essaie de continuer à travailler. Il m’a donc forcée à prendre un congé de maladie sans solde. Si je n’avais pas fait cette demande d’indemnisation au moment où je l’ai faite, j’aurais peut-être eu de graves problèmes financiers. »] Traduction de l’original anglais.
Aislene plaide en faveur d’un accommodement.
Transcription
I want people to know that we’re able to accommodate people with disabilities. We saw that at the beginning of the COVID pandemic and how we had to scramble to accommodate thousands upon thousands of people in workplaces and yet they’re, kind of, pulling that back and not offering those […]
Tanya ne comprend pas pourquoi ses collègues peuvent fixer leurs propres horaires alors que sa maladie ne peut pas être prise en compte.
Transcription
There’s plenty of other people, like of my coworkers, that have always had the ability to basically set their own schedule, and only work a couple of days a week, and so on and so forth. Like, just basically based around their family and their social life, and what they […]
Christine n’est autorisée à utiliser ses congés de maladie qu’en milieu de semaine, même si un lundi ou un vendredi lui laisserait plus de temps pour récupérer.
Transcription
I took every Tuesday off because I went to massage, acupuncture, and reflexology. And I went every Tuesday and I did all my three appointments on one day … And nobody said anything to me because it was a Tuesday. If I had said Monday or Friday, then I would […]
Kristen a dû trouver un nouveau représentant des ressources humaines lorsque sa première représentante a remis en question ses symptômes.
Transcription
I was dealing with an HR rep that was COVID-focused. Her job was to deal with the COVID pandemic, sort of thing. She seemed very supportive, and she was doing weekly check-ins with me, and then at one of our weekly check-ins she said, “Are you sure you’re just not […]
Jason s’inquiète de la stigmatisation associée à la maladie chronique.
Témoignage écrit
It’s very difficult to talk about. And, it’s something where I’m – yeah, it’s been hard for me to talk about it and reframe work arrangements. I did back in December when I went through like a severe bout of like burnout I should say, I ended up taking some unused vacation time and just like used that for some time off, and like it really stood in for like basically short-term disability. I wasn’t able to do – I had all these things that I wanted to do during those few weeks off but I wasn’t able to do them and I felt very, very bad. I did ask, like before taking this time off, to switch my role responsibilities and that seemed to help in the short term, but with the demands that the company that I work for has, I’m more or less doing the kind of thing that I was doing like going into December, and despite the commitment from the company to be accommodating and allow me to focus on a less stressful activity.
I: And so what made the conversations difficult with your employer?
Well, one, like not being able to talk – like really know how to frame and talk about the health issues that you have for fear of stigma, not being believed. For instance, if someone were to tell their boss that they had like fatigue and brain fog it’s just – it just seems to me to be outside of the norm and something that just would not be taken very seriously. If someone has anxiety and depression, like similar – whether or not your boss reacts well to it or like how seriously they would take it, those kinds of symptoms on their own, like they do impact the person’s perception of you in the future. Those symptoms seem – like they associate those things with your personality and who you are, rather than like an illness that you’re managing.
[C’est très difficile d’en parler. C’est quelque chose dont j’ai… oui, ce fut difficile de parler et de recadrer les modalités de travail. En décembre, lorsque j’ai traversé une grave crise d’épuisement professionnel, j’ai fini par prendre des vacances inutilisées pour avoir du temps libre, et elles ont remplacé l’incapacité de travail à court terme. Je n’ai pas pu faire toutes ces choses que je voulais faire pendant ces quelques semaines de congé, et je me suis senti très, très mal. J’ai demandé, comme avant de prendre ce congé, à changer les responsabilités de mon rôle et cela a semblé m’aider à court terme. Mais compte tenu des exigences de l’entreprise pour laquelle je travaille, j’accomplis plus ou moins le même genre de tâches qu’en décembre malgré l’engagement de l’entreprise à être conciliante et à me permettre de me concentrer sur une activité moins stressante.
I : Qu’est-ce qui a rendu les conversations difficiles avec votre employeur?
Tout d’abord, le fait de ne pas pouvoir parler, de ne pas savoir comment formuler et parler des problèmes de santé que l’on a par crainte de la stigmatisation, de ne pas être cru. Par exemple, si une personne devait dire à son/sa patron·ne qu’elle souffre de fatigue et de brouillard cérébral, cela me semble en dehors de la norme et quelque chose qui ne serait pas pris au sérieux. Si une personne souffre d’anxiété et de dépression, des symptômes similaires, que votre patron·ne y réagisse bien ou non, ou qu’iel les prenne au sérieux, ont un impact sur la perception que le·la patron·ne aura de vous à l’avenir. Ces symptômes semblent… comme s’ils associaient ces choses à votre personnalité et à qui vous êtes, plutôt qu’à la maladie que vous gérez.] Traduction de l’original anglais.
L’employeur de Katherine veut que tout le monde retourne au bureau.
Transcription
Like, our agency, everyone is forced back into the workplace, even my particular office is even going against the federal recommendation of two days a week in the office, and demanding the entire building come in on one – or sorry, my entire unit come in one day a week. […]
Le patron de Cathy était en colère parce qu’elle n’arrivait pas à faire face à son travail à temps plein.
Transcription
I realized as soon as I started I was in over my head because I was doing four hours per day. But that’s all I could do. Like, I would come home and go to bed. You know? I couldn’t do anything else. I couldn’t go mail a letter, I […]
Soutien des commissions d’indemnisation des accidents du travail
Plusieurs personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenu·es ont pu bénéficier d’une aide de la commission d’indemnisation des accidents du travail parce qu’elles avaient été infectées par la COVID-19 sur leur lieu de travail. Ce soutien comprenait l’accès à des soins de santé privés tels que la physiothérapie, une aide financière pour compenser la perte de revenus et des équipements adaptés.
Lori a reçu de nombreuses formes de soutien de la part de la commission des accidents du travail.
Transcription
Oh gosh, right from the beginning they gave me a cleaner because I couldn’t do stuff around here. And then I went to physio every week because I cough so much [laughs], so long, back spasms [long pause, crying] so that was really good. And I still have that, I […]
Paulina se souvient que certain·es de ses collègues ne croyaient pas qu’elle était malade, mais la CNESST (l’organisme d’indemnisation des travailleur·ses au Québec) ne l’a jamais remise en question.
Transcription
Yeah, it was that. And you know, they think – OK, they obviously didn’t say it in, like, to me right out front. But they implied that I am pretending to be still sick so that I can be on the workers comp, because I’m still on CNESST which is […]
Bien que les participant·es soient reconnaissant·es du soutien de la commission des accidents du travail, plusieurs ont fait remarquer que ce n’était pas toujours facile de faire une demande d’indemnisation. Jennifer1 a expliqué qu’après avoir reçu des soins médicaux pour un seul de ses symptômes, “WCB tried to make me go back to work … And I’m like ‘We’ve only dealt with the lungs. We haven’t dealt with all the other issues that I’m dealing with. How can you say that?’” [« la commission des accidents du travail a essayé de m’obliger à retourner au travail… Et je me suis dit “Nous n’avons traité que les poumons. Nous n’avons pas traité tous les autres problèmes auxquels je suis confrontée. Comment pouvez-vous dire ça?” »] Traduction de l’original anglais. Katherine est soulagée d’avoir droit à l’indemnisation des accidents du travail parce que son employeur l’a obligée à prendre un congé de maladie sans solde. Mais elle trouve frustrant que les mesures de soutien, telles que la physiothérapie, doivent être continuellement réévaluées. Par exemple, son gestionnaire de cas “would only approve … about eight weeks at a time. And then the physiotherapist would have to write a report showing that there has been some small amount of progress and he would do another eight weeks.” [« n’approuvait… qu’environ huit semaines à la fois. Ensuite, le physiothérapeute devait rédiger un rapport montrant un petit progrès et il faisait huit semaines de plus ».] Traduction de l’original anglais.
Cathy a reçu des informations erronées de son employeur sur la manière de déposer une demande d’indemnisation et, dans un premier temps, a limité de manière inappropriée l’aide apportée par la commission des accidents du travail.
Transcription
I sent an email to my supervisor and said “I think I – I’ve never done this in my life but I think I need to apply for WCB.” And the words were, “ No. No. No. You don’t have to do that. I’ll look after it.” And this kind […]